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Le plongeur : roman / Stéphane Larue
Livre
Edité par le Quartanier. Montréal (Québec) ; la Librairie du Québec (diff.). [Paris] - 2016
"Nous sommes à Montréal au début de l'hiver 2002. Le narrateur n'a pas vingt ans. Il aime Lovecraft, le métal, les comic books et la science-fiction. EÂtudiant en graphisme, il dessine depuis toujours et veut devenir bédéiste et illustrateur. Mais depuis des mois, il évite ses amis, ment, s'endette, aspiré dans une spirale qui menace d'engouffrer sa vie entière : c'est un joueur. Il joue aux loteries vidéo et tout son argent y passe. Il se retrouve à bout de ressources, isolé, sans appartement. C'est à ce moment qu'il devient plongeur au restaurant La Trattoria, où il se liera d'amitié avec Bébert, un cuisinier expérimenté, ogre infatigable au bagou de rappeur, encore jeune mais déjà usé par l'alcool et le speed. Pendant un mois et demi, ils enchaiÃneront ensemble les shifts de soir et les doubles, et Bébert tiendra auprès du plongeur le roÃle de mentor malgré lui et de flamboyant Virgile de la nuit. On découvre ainsi le train survolté d'un restaurant à l'approche des fêtes et sa galerie mouvante de personnages : propriétaire, chef, sous-chefs, cuisiniers, serveurs, barmaids et busboys. Si certains d'entre eux semblent plus grands que nature, tous sont dépeints au plus près des usages du métier, avec une rare justesse. C'est en leur compagnie que le plongeur tente de juguler son obsession pour les machines de vidéopoker, traversant les cercles d'une saison chaotique rythmée par les rushs, les luttes de pouvoir et les décisions néfastes"--Résumé de l'éditeur
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Coup de coeur de la Médiathèque
Contrairement à ce que le titre et les tentacules de la (magnifique) couverture pourraient laisser penser, pas de fonds marins ici, mais une plongée des les abysses des cuisines d'un restaurant de Montréal. Nous sommes au début des années 2000 et le narrateur, jeune étudiant en graphisme, passionné de Métal, de Lovecraft de de comics, touche le fond, pris par son addiction au jeu, et notamment ces machines à sous qui occupent le fond de salles de tous les bars du Canada. S'engluant dans le mensonge et les dettes, en rupture avec ses proches, un petit boulot où il est totalement néophyte (faire la plonge dans un restaurant italien) lui parait être la première étape d'un renouveau. Il va y découvrir un monde fait d'effervescence, de rythme endiablé, de sang, d'eau et de saveurs, où le bruit des casseroles et les engueulades incarnent une musique hypnotique. Il y découvre aussi toute une variété de personnages atypiques, tous un peu oiseaux de nuit ou gueules-cassées qui font vivre ses cuisines. Le quotidien est fait de travail harassant suivi de sorties destructrices, où les coins de zincs poisseux de bières et les pilules se croisent dans la brume. Dans ce magma de travail et d'émotion, reste à savoir si notre jeune plongeur va vers la lumière ou la destruction complète... Ce roman se démarque sur bien des points, il nous saisit, nous fait mijoter et nous fait sauter par moment. Vous l'aurez compris, la cuisine a une place à part ici, elle est même un personnage, un organisme à part entière. Elle pulse, elle crache, elle respire, elle tonne, elle dicte sa loi. C'est prenant, sur un rythme endiablé, les scènes derrière la plonge et les fourneaux nous laisses essoufflés, comme après une grande scène de thriller. Mais c'est aussi un grand roman d'apprentissage, initiatique, qui flirte avec brio avec le roman noir, notamment dans son écriture des personnages, absolument marquants et incarnés. Le fil du rasoir est aiguisé, et il est facile de tomber du mauvais côté des nuits enneigées de Montréal, avec ses coins sombres et ses dealers. Les lumières sont captivantes, mais le danger, qu'il soit physique ou psychologique pour notre personnage addict, est toujours présent, somnolant. Enfin il est important de mentionner que ce roman est écrit "en québécois" si je puis dire. C'est à dire que les expressions québécoises dans les dialogues, mais aussi les mots en anglais sont très présents. Si au début cela peut être déroutant, très vite cette langue particulière nous happe et nous emmène. Parce que ça a du bon d'être déstabilisé par l'écriture parfois. Au final un grand roman de nuit, de spleen et de fureur, de cuisine et de vie. Ostie de réussite !
La Médiathèque - Le 06 octobre 2020 à 13:35